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Voitures électriques : saviez-vous qu’elles dominaient les routes il y a plus d’un siècle ?

Philippe Moureau

Vous pensiez que les voitures électriques étaient une invention récente ? Détrompez-vous ! Au début du 20ème siècle, ces véhicules silencieux dominaient déjà les rues de nombreuses villes, bien avant la popularisation des moteurs thermiques. Plongeons ensemble dans cette fascinante histoire méconnue qui résonne étrangement avec notre époque.

L’essor fulgurant des voitures électriques au tournant du siècle

En 1900, alors que l’automobile n’en est qu’à ses balbutiements, un chiffre surprenant émerge : 38% des véhicules immatriculés aux États-Unis sont électriques. Ce n’est pas une erreur de frappe ! On dénombre pas moins de 33 842 voitures électriques en circulation cette année-là, un chiffre qui grimpe à plus de 38 000 en 1912.

Comment expliquer un tel engouement ? À l’époque, les voitures à essence sont perçues comme bruyantes, polluantes et surtout dangereuses. Le démarrage à la manivelle, en particulier, est un véritable cauchemar qui peut facilement se solder par un bras cassé en cas de retour de manivelle. Face à ces engins capricieux, les voitures électriques apparaissent comme une alternative séduisante :

  • Silencieuses et sans vibrations
  • Démarrage instantané, sans effort
  • Absence d’odeurs désagréables
  • Conduite simple, sans boîte de vitesses
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Ces qualités en font rapidement les chouchous de la haute société, et particulièrement des femmes qui apprécient leur facilité d’utilisation. Les constructeurs ne s’y trompent pas et axent leur marketing sur cette clientèle aisée et féminine.

Des performances qui n’ont rien à envier aux modèles actuels

Contrairement aux idées reçues, les voitures électriques de cette époque ne sont pas forcément à la traîne en termes de performances. En 1899, le belge Camille Jenatzy établit un record du monde de vitesse à bord de “La Jamais Contente”, première voiture à dépasser les 100 km/h. Ce bolide électrique en forme de torpille, avec sa carrosserie en alliage d’aluminium, préfigure déjà les préoccupations aérodynamiques modernes.

Côté autonomie, si la moyenne se situe autour de 65 km, certains modèles font nettement mieux. La “100-Mile Fritchle Electric” affiche fièrement ses 160 km d’autonomie, une performance remarquable pour l’époque. Elle dispose même d’un système de récupération d’énergie au freinage, une technologie qu’on croirait récente !

Voici un tableau comparatif de quelques modèles emblématiques :

ModèleAnnéeAutonomieVitesse max
Detroit Electric1922145 km40-48 km/h
Baker Electric1910110-160 km32 km/h
Fritchle Electric1912160 km40 km/h

Un écosystème complet, précurseur de notre époque

L’adoption massive des voitures électriques s’accompagne du développement d’un véritable écosystème. Des bornes de recharge font leur apparition dans certains centres commerciaux, préfigurant nos actuelles stations de supercharge. Les véhicules électriques ne se limitent pas aux voitures particulières : on trouve également des camionnettes de livraison, des ambulances et même des véhicules de police fonctionnant à l’électricité.

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Un exemple fascinant est celui des “milk floats” au Royaume-Uni. Ces camionnettes électriques dédiées à la livraison du lait font leur apparition au début du 20ème siècle et resteront en service pendant des décennies, évoluant au fil du temps. Leur disparition ne sera due qu’à l’avènement des supermarchés et des réfrigérateurs domestiques, non à des problèmes techniques.

Le déclin brutal : quand l’histoire bégaie

Malgré cet âge d’or, les voitures électriques vont connaître un déclin aussi brutal que leur ascension. Les raisons de cette chute vous sembleront étrangement familières :

  • Un coût d’achat élevé : en 1922, une Detroit Electric coûte près de 3000 dollars, soit six fois le prix d’une Ford T !
  • Une autonomie limitée face à l’amélioration des voitures thermiques
  • Des batteries chères avec des temps de charge longs
  • Un manque d’infrastructures de recharge hors des grandes villes

Le coup de grâce viendra de l’invention du démarreur électrique pour les moteurs thermiques. En éliminant le principal inconvénient des voitures à essence, cette innovation signe l’arrêt de mort de la plupart des constructeurs de voitures électriques. Dès le milieu des années 1920, la majorité d’entre eux ont mis la clé sous la porte.

Cette histoire fascinante nous rappelle que l’innovation technologique n’est pas toujours linéaire. Les défis auxquels font face les voitures électriques aujourd’hui – autonomie, coût, infrastructure de recharge – ne sont finalement pas si différents de ceux d’il y a un siècle. La différence majeure réside peut-être dans notre prise de conscience environnementale et la nécessité de trouver des alternatives durables aux énergies fossiles.

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Alors que nous vivons une nouvelle révolution électrique, il est intéressant de se pencher sur cette histoire oubliée. Elle nous rappelle que les cycles d’innovation sont parfois plus longs et plus complexes qu’on ne le pense. Qui sait ? Peut-être que dans un siècle, nos descendants redécouvriront avec étonnement l’histoire des voitures à essence, ces curieux engins bruyants et polluants qui ont dominé le 20ème siècle avant de disparaître.

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