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La voiture électrique est un gouffre fiscal que la France n’avait pas vu venir

Philippe Moureau

Face à l’essor des véhicules électriques, l’État français se trouve confronté à un paradoxe financier inattendu. Alors que la transition écologique s’accélère avec la montée en puissance des ventes de voitures à batterie, les caisses publiques pourraient se vider progressivement. Une situation qui soulève des questions essentielles sur l’avenir de la fiscalité automobile dans l’Hexagone.

Le carburant, une manne fiscale en voie de disparition

Saviez-vous que lorsque vous faites le plein, près de 60% du prix payé va directement dans les caisses de l’État? La Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Énergétiques (TICPE) constitue le quatrième revenu fiscal français, juste derrière la TVA, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés.

Cette taxe, appliquée sur les volumes d’essence et de diesel vendus, génère actuellement 33 milliards d’euros par an. Une somme colossale qui finance nos services publics, nos infrastructures et bien d’autres postes budgétaires essentiels.

Mais voilà qu’avec l’électrification programmée du parc automobile, cette ressource fiscale est vouée à disparaître. Selon les projections de la Direction générale du Trésor, cette érosion sera rapide :

  • D’ici 2030, perte estimée de 11 milliards d’euros sur les recettes issues des énergies fossiles
  • À l’horizon 2050, disparition quasi-totale des 33 milliards d’euros de recettes annuelles
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L’électricité ne compensera pas le manque à gagner

Vous pourriez penser que les taxes sur l’électricité viendront naturellement remplacer celles sur les carburants fossiles. La réalité est bien différente. Selon les études de la Direction générale du Trésor, les recettes fiscales issues de l’électricité resteront marginales comparées à celles générées par les carburants traditionnels.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les taxes sur l’électricité ne rapporteront qu’environ 1 milliard d’euros en 2030 et seulement 3 milliards en 2050. Un écart abyssal avec les 33 milliards actuellement perçus sur les carburants fossiles.

Ce déséquilibre s’explique par la structure même de la fiscalité énergétique française, historiquement construite autour des produits pétroliers. La taxation de l’électricité obéit à des logiques différentes et reste, pour l’instant, bien moins lucrative pour l’État.

Une transition écologique très coûteuse pour les finances publiques

Au-delà des pertes de recettes fiscales, l’État français supporte également le coût des incitations à l’achat de voitures électriques. Entre bonus écologique, primes à la conversion et autres dispositifs d’aide, la facture est salée.

Selon France Stratégie, le coût pour les finances publiques atteindrait 600 euros par tonne de CO2 évitée, voire 800 euros en intégrant les pertes de recettes fiscales induites. Des montants considérables qui interrogent sur la soutenabilité financière du modèle actuel.

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HorizonPertes fiscales (carburants)Gains fiscaux (électricité)Déficit net
203011 milliards €1 milliard €10 milliards €
205033 milliards €3 milliards €30 milliards €

Vers une inévitable taxation des véhicules électriques

Face à ce défi budgétaire majeur, l’État français devra nécessairement inventer de nouveaux mécanismes fiscaux. La fin récente de la prime à la conversion en décembre dernier n’est probablement que le premier signe d’une réorientation des politiques publiques.

À terme, la taxation des véhicules électriques semble inéluctable. Plusieurs pistes sont envisageables :

  • Une augmentation significative de la taxation de l’électricité destinée à la mobilité
  • L’instauration d’une taxe kilométrique, comme l’envisage déjà la Suisse
  • Une refonte du système de taxe sur les véhicules, indépendamment de leur motorisation

L’exemple suisse est particulièrement éclairant. Nos voisins réfléchissent déjà à différentes modalités pour taxer les véhicules électriques afin de compenser la baisse des revenus issus des carburants. Leur approche pourrait servir de modèle à la France dans les années à venir.

Un équilibre délicat entre transition écologique et réalité budgétaire

Le défi pour l’État français sera de trouver un équilibre entre la nécessaire transition écologique et la santé des finances publiques. Taxer trop fortement les véhicules électriques risquerait de freiner leur adoption. Ne pas les taxer suffisamment créerait un gouffre financier insoutenable.

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Cette équation complexe devra être résolue dans la prochaine décennie. Des ajustements progressifs sont probables, pour amortir le choc fiscal tout en maintenant le cap vers la neutralité carbone. La question n’est plus de savoir si les voitures électriques seront taxées, mais quand et comment elles le seront.

Pour vous, propriétaires actuels ou futurs de véhicules électriques, il serait sage d’anticiper cette évolution fiscale inéluctable. Les avantages économiques actuels de la mobilité électrique pourraient s’éroder progressivement, même si son bénéfice écologique reste indéniable.

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