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BYD et Tesla : l’alliance qui pourrait sonner le glas des moteurs thermiques

Philippe Moureau

Dans un marché automobile en pleine mutation, l’idée d’une collaboration entre les deux géants mondiaux de la mobilité électrique fait son chemin. BYD, le mastodonte chinois, tend la main à Tesla pour accélérer la transition énergétique mondiale. Cette ouverture pourrait redessiner complètement le paysage de l’industrie automobile des prochaines décennies, avec comme objectif commun: faire disparaître progressivement les véhicules à combustion interne.

La déclaration qui change la donne

“Notre ennemi commun est la voiture thermique. Nous devons travailler ensemble.” Cette phrase prononcée par Stella Li, présidente de BYD, lors d’une interview accordée au Financial Times, résonne comme un véritable appel à l’union sacrée. Une main tendue qui arrive dans un contexte où les tensions commerciales entre la Chine et l’Occident n’ont jamais été aussi vives.

La dirigeante chinoise va plus loin en affirmant que son pays serait “plus ouvert aux entreprises étrangères que l’Occident“, une déclaration qui pourrait surprendre alors que les barrières douanières se multiplient des deux côtés. Selon Mme Li, les “perceptions des uns et des autres sont probablement erronées” concernant l’attitude du Parti communiste chinois vis-à-vis des investissements étrangers.

La représentante de BYD précise que “les entreprises étrangères peuvent venir en Chine, le gouvernement vous soutiendra et travaillera avec vous pour permettre la réalisation de vos projets”. Une invitation directe à Tesla qui pourrait y voir une opportunité stratégique majeure pour renforcer sa position sur le plus grand marché automobile mondial.

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Les domaines potentiels de collaboration

Si l’idée d’une alliance entre ces deux rivaux peut sembler surprenante, plusieurs axes de coopération se dessinent naturellement. BYD affirme être “prêt à partager des technologies clés dans le domaine des voitures électriques et de la conduite autonome” avec des entreprises étrangères, dont Tesla.

  • Développement conjoint de batteries nouvelle génération pour réduire les coûts et augmenter l’autonomie
  • Partage des technologies de conduite autonome pour accélérer leur déploiement
  • Mutualisation des réseaux de bornes de recharge à l’échelle mondiale
  • Standardisation des protocoles de recharge rapide pour faciliter l’adoption massive

Un partenariat technologique pourrait également déboucher sur une optimisation des chaînes d’approvisionnement, particulièrement pour les matières premières stratégiques comme le lithium, le cobalt ou le nickel, dont les prix ont augmenté de plus de 300% ces dernières années.

Le contexte économique favorable à un rapprochement

Cette proposition intervient à un moment où Tesla traverse une période difficile en Europe. Les ventes de la marque américaine se sont littéralement effondrées sur le Vieux Continent en ce début d’année 2025, tandis que BYD poursuit sa croissance fulgurante.

Pour Tesla, une collaboration avec BYD pourrait représenter un accès privilégié au marché chinois, qui représente désormais plus de 60% des ventes mondiales de véhicules électriques. La firme d’Elon Musk pourrait également bénéficier du savoir-faire de BYD dans la production de batteries LFP (Lithium Fer Phosphate), réputées moins coûteuses et plus durables que les batteries NMC (Nickel Manganèse Cobalt) qu’elle utilise actuellement.

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Pour BYD, s’associer avec Tesla ouvrirait plus largement les portes des marchés occidentaux, où la marque chinoise peine encore à s’imposer face aux réticences des consommateurs et aux barrières réglementaires. L’expertise de Tesla en matière de logiciels et d’interface utilisateur pourrait également combler certaines lacunes des véhicules BYD.

Les défis politiques d’une telle alliance

Malgré l’enthousiasme affiché par BYD, de nombreux obstacles se dressent sur la route d’un éventuel partenariat. La politique protectionniste du président Trump aux États-Unis pourrait compromettre toute forme de collaboration avec une entreprise chinoise.

La présidente de BYD semble pourtant sereine face à cette situation. Elle estime qu’il ne faut pas s’inquiéter des nouvelles politiques américaines, car selon elle, les consommateurs finiront par choisir la voiture électrique parce qu’elle est “plus intelligente et de meilleure qualité“.

En Europe, la situation n’est guère plus favorable, avec l’instauration récente de droits de douane pouvant atteindre 45,3% sur les véhicules électriques chinois. Ces mesures visent explicitement à protéger l’industrie automobile européenne face à ce qui est perçu comme une concurrence déloyale.

Les enjeux technologiques d’une possible synergie

Sur le plan technique, la complémentarité entre les deux constructeurs pourrait être significative. BYD dispose d’une expertise reconnue dans la conception de batteries avec sa technologie propriétaire “Blade Battery” qui offre une sécurité accrue et une densité énergétique de plus de 180 Wh/kg.

Tesla, de son côté, excelle dans le développement de logiciels et de systèmes de conduite autonome avec son programme FSD (Full Self-Driving) qui accumule des millions de kilomètres de données chaque jour pour améliorer ses algorithmes.

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Domaine d’expertiseBYDTesla
BatteriesTechnologie Blade Battery (LFP)Batteries 4680 (NMC)
AutonomieJusqu’à 570 km (SEAL)Jusqu’à 723 km (Model S)
Conduite autonomeDiPilot (niveau 2)FSD (niveau 2+)
Production annuelle3,02 millions (2024)1,8 million (2024)

Cette complémentarité pourrait accélérer considérablement la transition vers l’électromobilité et renforcer la position des deux entreprises face aux constructeurs traditionnels qui tentent de rattraper leur retard.

L’impact potentiel sur l’industrie automobile mondiale

Une alliance entre les deux leaders mondiaux des voitures électriques pourrait créer une force si puissante qu’elle accélérerait drastiquement le déclin des moteurs thermiques. Ensemble, BYD et Tesla ont produit près de 5 millions de véhicules électriques en 2024, soit plus que l’ensemble des autres constructeurs réunis.

Cette synergie pourrait également permettre des économies d’échelle considérables, réduisant encore davantage le coût des véhicules électriques. Selon les projections des analystes, le prix moyen pourrait baisser de 15 à 20% d’ici 2028 si une telle collaboration voyait le jour.

Pour les constructeurs traditionnels, déjà en difficulté face à la montée en puissance des véhicules électriques, une telle alliance représenterait une menace existentielle. Les investissements colossaux nécessaires pour rattraper leur retard technologique deviendraient encore plus difficiles à rentabiliser face à cette concurrence renforcée.

Les consommateurs, quant à eux, seraient les grands gagnants de cette situation, avec des véhicules électriques plus abordables, plus performants et disposant d’infrastructures de recharge plus développées. La transition énergétique dans le secteur des transports s’en trouverait considérablement accélérée, avec un impact positif majeur sur la réduction des émissions de CO2.

La question reste maintenant de savoir si Elon Musk saisira cette perche tendue par son principal concurrent ou s’il préférera poursuivre sa stratégie en solo. Une chose est certaine : l’invitation de BYD marque un tournant dans l’industrie automobile, où la coopération pourrait prendre le pas sur la compétition face à l’urgence climatique.

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