Actu voiture électrique

Les constructeurs chinois savent déjà comment contourner les taxes européennes

François Zhang-Ming

Face aux barrières douanières imposées par l’Union Européenne sur les voitures électriques fabriquées en Chine, les constructeurs asiatiques font preuve d’une adaptabilité remarquable. Cette réactivité leur permet de maintenir leur offensive sur le marché européen malgré des taxes qui peuvent atteindre jusqu’à 35,3% sur certains modèles. Leur solution? Se tourner massivement vers l’hybride rechargeable, une catégorie jusqu’ici épargnée par les mesures protectionnistes européennes.

La faille réglementaire qui profite aux constructeurs chinois

L’Union Européenne a instauré des droits de douane significatifs sur les voitures électriques chinoises, accusant Pékin de subventionner massivement son industrie automobile. Ces taxes, qui s’ajoutent aux 10% déjà en vigueur, peuvent désormais grimper jusqu’à 35,3% pour certains constructeurs comme SAIC (propriétaire de MG). BYD est soumis à une taxe de 27,5% tandis que Chery doit s’acquitter de 21,3%.

Mais les stratèges chinois ont identifié une incohérence majeure dans la réglementation européenne: si les véhicules 100% électriques sont lourdement taxés, les modèles hybrides rechargeables (PHEV) échappent à ces sanctions. Une aubaine que les constructeurs de l’Empire du Milieu exploitent pleinement.

A lire également :  Les marques chinoises de voitures électriques explosent en Europe

Le virage stratégique vers l’hybride rechargeable

Cette faille réglementaire a provoqué un changement radical dans la stratégie des constructeurs chinois. BYD, initialement positionné comme champion de l’électrique, mise désormais massivement sur les motorisations hybrides rechargeables. La marque a notamment lancé la Seal U DM-i en Europe et prévoit d’accompagner chaque nouveau modèle électrique d’une version hybride rechargeable.

MG (SAIC) a également adopté cette approche avec un succès fulgurant:

  • Au premier trimestre 2025, MG a vendu 47 000 véhicules hybrides, PHEV et thermiques en Europe
  • Ces chiffres représentent plus du double des ventes enregistrées à la même période en 2024

“Ce n’était qu’une question de temps avant que les constructeurs ne trouvent un moyen détourné d’accéder au marché européen”, analyse Didi Bostock, expert du cabinet Rho Motion, dans une déclaration à Reuters. “Et c’est désormais chose faite, grâce aux hybrides.”

Des ventes qui explosent malgré les barrières douanières

Les données récentes confirment l’efficacité de cette stratégie de contournement. Selon Reuters, BYD et Chery ont écoulé 757 hybrides rechargeables en Europe en mars 2025, alors qu’ils n’en avaient vendu aucun en juillet 2024, avant l’instauration des droits de douane punitifs.

Cette situation crée un paradoxe pour l’Union Européenne. En cherchant à protéger son industrie automobile et à favoriser la transition vers le tout électrique, Bruxelles a involontairement poussé les constructeurs chinois à privilégier des technologies hybrides, pourtant plus émettrices de CO2 que les véhicules 100% électriques. Une contradiction flagrante avec l’objectif européen d’interdire la vente de véhicules thermiques d’ici 2035.

A lire également :  Toyota s’allie à la Chine pour casser les prix de ses voitures électriques

Un timing parfait avec l’évolution des attentes des consommateurs

Cette réorientation stratégique coïncide avec un certain essoufflement du marché des véhicules 100% électriques. L’année 2024 a été difficile pour cette catégorie, même si les chiffres du premier trimestre 2025 montrent des signes d’amélioration.

Les consommateurs européens, freinés par diverses préoccupations liées à l’électrique pur (autonomie, infrastructure de recharge, prix), se tournent de plus en plus vers l’hybride rechargeable. Maria Grazia Davino, responsable de la division européenne de BYD, confirme cette tendance en déclarant que la marque s’appuiera désormais sur “deux piliers”, l’un électrique et l’autre électrifié (hybride et hybride rechargeable).

ConstructeurTaxe sur modèles électriquesStratégie de contournement
BYD27,5%Lancement de modèles hybrides + projet d’usine en Hongrie
MG (SAIC)35,3%Forte poussée sur les hybrides et PHEV
Chery21,3%Diversification vers l’hybride rechargeable

Une solution temporaire avant la production européenne

Si l’hybride rechargeable constitue une réponse immédiate efficace aux droits de douane, les constructeurs chinois préparent déjà l’étape suivante. Plusieurs d’entre eux ont annoncé leur intention d’établir des usines directement en Europe, ce qui leur permettrait d’échapper totalement aux taxes puisque celles-ci ne s’appliquent qu’aux véhicules assemblés en Chine.

BYD a déjà confirmé la construction d’une usine en Hongrie, tandis que Leapmotor et Xpeng étudient également la possibilité de produire sur le sol européen. Cette délocalisation partielle de la production représente l’évolution logique de leur stratégie d’implantation à long terme en Europe.

A lire également :  Ce moteur 4-en-1 inédit pourrait sauver la voiture thermique

Ce double mouvement – exploitation de la niche hybride rechargeable et préparation d’une production locale – démontre la résilience et l’agilité des constructeurs chinois face aux obstacles réglementaires. Pendant que l’Europe tente de les ralentir par des barrières douanières, ils s’adaptent et continuent leur progression sur un marché qu’ils considèrent comme stratégique pour leur développement international.

Réagissez à l'article
guest

3 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires