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Grâce à Volkswagen, ces voitures chinoises seront estampillées “Made in Germany”

Philippe Moureau

Le groupe chinois Chery, encore peu connu sur nos routes mais géant dans son pays d’origine, négocie activement pour produire ses véhicules électriques dans d’anciennes usines Volkswagen en Allemagne. Cette stratégie, dictée par les nouvelles taxes européennes, pourrait redéfinir l’équilibre des forces dans l’industrie automobile du continent.

Chery à l’assaut de l’Europe : une stratégie d’implantation ambitieuse

Le constructeur chinois Chery, propriétaire des marques Exeed, Jetour, Jaecoo et Omoda, intensifie ses efforts pour s’implanter durablement sur le marché européen. Charlie Zhang, vice-président de Chery International, a confirmé que des négociations “déjà avancées” sont en cours avec Volkswagen pour utiliser certaines de leurs installations allemandes sous-exploitées.

Cette décision répond à une problématique économique simple : éviter la taxe de 21% imposée aux véhicules électriques fabriqués en Chine et importés en Europe. Une production locale permettrait de proposer des prix bien plus compétitifs aux consommateurs européens, tout en garantissant un accès aux dispositifs d’aide à l’achat comme le bonus écologique français.

Les défis d’une production allemande pour un constructeur chinois

L’équation n’est pas simple pour Chery. Comme l’a souligné son vice-président, “la situation est extrêmement complexe” en Allemagne. Le groupe doit naviguer dans un environnement très différent de son marché domestique :

  • Les coûts de main-d’œuvre nettement plus élevés qu’en Chine
  • Des syndicats puissants avec lesquels il faudra négocier
  • Des exigences réglementaires strictes propres au marché européen
  • La restructuration des chaînes d’approvisionnement pour une production locale
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Derrière ces négociations se dessine une réalité économique : produire en Allemagne coûtera inévitablement plus cher qu’en Chine. La question est de savoir si l’économie réalisée sur les droits de douane compensera suffisamment cette hausse des coûts de production.

Les modèles Chery qui pourraient sortir des chaînes allemandes

Si l’accord avec Volkswagen se concrétise, quels véhicules pourrions-nous voir sortir des usines allemandes? Le SUV électrique Omoda 9, récemment lancé en Espagne, figure parmi les candidats probables. Ce modèle, qui incarne les ambitions européennes de Chery, pourrait devenir l’un des premiers véhicules du groupe produits en Allemagne.

Le groupe pourrait également y fabriquer des modèles de sa gamme Tiggo, actuellement proposés en version hybride rechargeable. Ces véhicules représentent un compromis intéressant pour les consommateurs hésitant encore à passer au tout électrique.

ModèleTypeProduction actuelleProduction future possible
Omoda 9SUV électriqueChineAllemagne + Espagne
TiggoSUV hybride rechargeableChineAllemagne + Espagne
Modèles JaecooDiversChineAllemagne + Espagne

Une stratégie multi-sites déjà en marche

L’intérêt pour les usines allemandes de Volkswagen n’est qu’une partie de la stratégie européenne de Chery. Le constructeur dispose déjà d’une usine opérationnelle en Espagne depuis fin 2024. Ce site assemble actuellement des véhicules en kit importés de Chine, une solution transitoire qui ne permet pas d’échapper aux restrictions du bonus écologique français.

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Le groupe prévoit de moderniser cette installation espagnole et de développer des partenariats avec des sous-traitants locaux. L’objectif est clair : augmenter progressivement le taux d’intégration européenne de ses véhicules pour qu’ils soient considérés comme produits localement.

Parallèlement, Chery renforce sa présence européenne avec un centre de R&D en Allemagne depuis 2018, et cherche à étoffer ses équipes techniques et de design sur le continent. Cette approche témoigne d’une vision à long terme, au-delà d’une simple stratégie d’exportation.

Un laboratoire pour les relations sino-européennes dans l’automobile

L’éventuelle production de véhicules Chery dans des usines Volkswagen représenterait un précédent majeur dans l’industrie automobile. Pour la première fois, un constructeur européen historique pourrait ouvrir ses installations à un concurrent chinois direct, reconnaissant implicitement la nouvelle réalité du marché.

Cette collaboration forcée par les circonstances économiques illustre le dilemme actuel des constructeurs européens : confrontés à une surcapacité de production estimée à 3 millions de véhicules par an en Europe, ils cherchent désespérément à rentabiliser leurs installations industrielles, quitte à aider leurs concurrents à s’implanter.

Pour les consommateurs européens, cette évolution pourrait se traduire par une offre plus large de voitures électriques à des prix potentiellement plus accessibles. Les véhicules Chery produits en Allemagne bénéficieraient non seulement de l’image de qualité associée au “Made in Germany”, mais aussi d’une meilleure adaptation aux attentes européennes grâce à la proximité avec leurs clients finaux.

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L’arrivée de Chery dans les usines allemandes marquerait donc une nouvelle étape dans la recomposition du paysage automobile mondial, où les frontières traditionnelles entre constructeurs, marchés et origines s’estompent progressivement au profit d’un écosystème plus complexe et interconnecté.

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